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LA THÉORIE GÉNÉTIQUE

Dans cette théorie, les facteurs génétiques ont un rôle déterminant et quasi-exclusifs. Les tissus adjacents et l’environnement ne peuvent influencer durablement la forme. Pour Brodie1 en 1946 : «la croissance de la face est proportionnée. Ceci veut dire que la dysharmonie, lorsqu’elle existe, est présente avant la naissance. Elle ne devient ni meilleure, ni pire et ne peut être changée par le traitement».
Commentaire : nous somme en 1946, la théorie du «facial pattern» prédomine. On naît comme on est et toute notre construction crânienne est prédéterminée par la génétique. Pour les orthodontistes on peut tout au plus mobiliser une dent, mais tout s’arrête là. Cette vision est donc extrêmement réductrice, ne laisse place à rien. Mais si on veut bien comprendre les avancées actuelles sur la croissance crânienne, nous sommes obligés de comprendre dans quel moule s’est forgé cette profession, et indirectement l’ostéopathie.

La théorie de Weinmann et Sicher

En 1955, Weinmann et Sicher2 présentent la croissance crânienne comme homothétique, c’est à dire, proportionnelle. Certaines sutures étant parallèles, la croissance est rayonnante et en ligne droite.

Weinmann J.-P, Sicher H. Bone and bones. fundamentals of bone biologiy. C.V Mosby C° ed., St Louis, 1955

Pour ces auteurs, ce sont des facteurs génétiques intrinsèques qui contrôlent l’activité des sutures. Ce sont des centres actifs et autonomes.
Commentaire : 9 ans plus tard, le «facial pattern» prédomine encore la pensée. On sait maintenant que ces théories sont partiellement fausses.
La croissance crânienne n’est absolument régulière, tant dans ses directions (il n’y a aucune ligne droite), que dans son évolution au fil des années. En 1960 Delattre et Fénart écrivent l’hominisation du crâne3. Ils nous proposent cette superposition de différents crânes pris à plusieurs moment de leur croissance.

Delattre A, Fénart R. L’hominisation du crâne étudiée par la méthode vestibulaire. Centre National de la Recherche Scientifique. 1960.

On voit bien sur ce schéma que, d’une part, l’espace entre chaque ligne est différent selon que l’on regarde le front ou le maxillaire. Il y a un âge pour grandir du front, un autre pour grandir de la bouche, on ne peut pas tout faire en même temps !! D’autre part les divers points crâniométriques ne se déplacent pas en ligne droite, mais bien selon des courbes, que les orthodontistes appellent les rotations de croissance4. Beaucoup plus récemment, Fénart5 publie toute les différentes vitesses et vecteurs de croissance en observant et mesurant le déplacement de différents points crâniométriques.

Fénart R. Ontogénèse crâniographique vestibulaire. Analyse morphométrique positionnelle. 2006.

Fénart R. Ontogénèse crâniographique vestibulaire. Analyse morphométrique positionnelle. 2006.

Le bleu correspond a une forte croissance, le vert à une faible croissance. L’intervalle D1D2 correspond à la croissance entre 81/2 mois et 2 ans et l’intervalle EF correspond à la croissance entre 4 ans et 81/2.
On remarque que la voûte a un fort potentiel de croissance entre 8 mois et 2 ans. Entre 4 et 8 ans la croissance de la voute et de la base du crâne est presque terminée, en revanche la mandibule et le maxillaire sont en pleine évolution de croissance.

La théorie de Scott (6) :

Nous sommes en 1967. Pour Scott, les sutures cartilagineuses et synchondroses (articulations de la base du crâne), jouent un rôle prépondérant dans la croissance.
Le cartilage est capable de grandir à la fois par apposition périphérique et de manière interstitielle4. Il contredit ainsi les idées de Sicher qui réfutait complètement l’idée d’une croissance interstitielle7. Grâce à cette croissance, la synchondrose sphénobasilaire (articulation entre l’occiput en arrière et le sphénoïde en avant) continue son ossification plus tardivement.
Il dit autre chose d’intéressant, le cartilage du septum nasal a une responsabilité importante dans la séparation des os de la face. Il lui accorde un rôle prédominant dans la forme de la face.

Il émet une théorie, toujours d’actualité, même si elle s’est beaucoup affinée selon laquelle :
Il existe des centres de croissance primaire : les synchondroses. Les cartilages sont dominants, moteurs et réglés par les facteurs génétiques intrinsèques.
Il existe centres d’ossification secondaires : les syndesmoses. Elles sont dominées, passives et adaptatives. Elles ont un rôle passif de remplissage.

Mais, car il en faut bien un : les facteurs génétiques jouent un rôle essentiel et dominant.

Commentaire : Scott dissocie les os de membranes (ceux qui donneront la voûte) et les os cartilagineux (ceux qui donneront la base de crâne). Pour nous, ostéopathes, cette distinction est capitale car, les processus d’ossification étant différents, nos techniques, adaptées à ces tissus seront différentes. Cependant, nous verrons que les facteurs génétiques ne sont pas responsables de tout et que l’environnement conditionne (avec cette dominante génétique) la croissance osseuse.


1 : Brodie A.-G. Facial patterns : a theme on variation. Angle Orthod 16 : 75-87, 1946
2 : Weinmann J.-P, Sicher H. Bone and bones. fundamentals of bone biologiy. C.V Mosby C° ed., St Louis, 1955
3 : Delattre A, Fénart R. L’hominisation du crâne étudiée par la méthode vestibulaire. Centre National de la Recherche Scientifique. 1960.
4 : Lautrou A. Croissance faciale : théories explicatives et clinique orthodontique. Rev Orthop Dento Faciale. 28. 1994. 433-453.
5 : Fénart R. Ontogénèse crâniographique vestibulaire. Analyse morphométrique positionnelle. 2006.
6 : Scott J.-H. Dentofacial development and growth. Pergamon series on dentistry N°6. Pergamon Press Ltd. 205p Oxford, 1967.
7 : Delaire J. Le concept “cortical”. CEO, Paris. International Orthodontics. 2006. 4, 241-260.